mercredi 1 novembre 2023

L'enlèvement : tragédie intime et fresque politico-religieuse magistrale

 ★★★★

En même temps qu’une tragédie intime terrible, l’enlèvement est une grande fresque politico-religieuse, magistrale. (...) Bien sûr qu’avec une telle histoire, il y a des moments déchirants, comme la scène de l'enlèvement d'Edgardo à ses parents par la police, ou la visite de sa mère à Rome. Mais l'émotion qui prédomine dans le film, c'est la colère.

(critique complète ci-dessous ou ici)

En 1858, à Bologne, en Italie, Edgardo, pas encore sept ans, est retiré à ses parents Juifs par ordre de l’évêque de la ville. Il aurait été baptisé en secret par sa nourrice six ans auparavant. Edgardo n’est plus Juif mais chrétien, il doit donc recevoir une éducation catholique. Il est envoyé à Rome, sous la protection directe du Pape Pie IX. 

L'histoire est terrible, choquante, d'autant qu'elle est vraie ! En choisissant de raconter cette histoire avant tout du point de vue de la famille d'Edgardo, le film adopte forcément un ton subjectif et assume certains partis pris. Mais les faits sont là… révoltants. 

En même temps qu’une tragédie intime terrible, l’enlèvement est une grande fresque politico-religieuse, magistrale. Au milieu du XIXe siècle, la papauté jouit d’un pouvoir politique absolu mais qui est en train de s’effriter. Le peuple commence à gronder... 

Bien sûr qu’avec une telle histoire, il y a des moments déchirants, comme la scène de l'enlèvement d'Edgardo à ses parents par la police, ou la visite de sa mère à Rome. Mais l'émotion qui prédomine dans le film, c'est la colère. Une colère contre les abus de pouvoir, contre les institutions qui considèrent, au nom de Dieu, avoir un pouvoir absolu, contre l'antisémitisme latent qui régnait à l'époque (et pas seulement à l'époque, malheureusement)... 

Aujourd'hui, les choses ont certes changé dans l’Eglise catholique. Un tel fait divers ne pourrait plus avoir lieu. Mais la portée du film reste pertinente, dans son évocation des dangers d’une collusion entre le religieux et le politique, dans sa dénonciation de l'endoctrinement voire de l'obscurantisme de tout bord. 

Le film impressionne : la vitalité baroque de la réalisation et l'audace de certaines scènes oniriques étonnent chez un "jeune" réalisateur octogénaire ! 

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L'enlèvement, un film de Marco Bellocchio
avec Enea Sala, Leonardo Maltese, Paolo Pierobon

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