vendredi 30 novembre 2018

Lola et ses frères : une jolie comédie sur la famille, avec plein de tendresse dedans !

Lola a deux grands frères... Ces trois s'adorent. Mais la relation des deux frères est faite aussi souvent de disputes et d'engueulades. Et c'est toujours Lola qui apaise les conflits et essaye de rattraper les gaffes qu'ils commettent. Tous les mois ils se retrouvent au cimetière, sur la tombe de leurs parents, pour parler... Benoît se marie pour la troisième fois, Pierre est débordé par son travail, quant à Lola elle va, enfin, rencontrer l'amour.

Lola et ses frères est une vraie comédie : on rit souvent, grâce à des personnages bien caractérisés et des dialogues qui font mouche. Mais c'est aussi un film plein de tendresse et de sensibilité, un cocktail que Jean-Paul Rouve sait si bien équilibrer, comme dans son précédent film, Les souvenirs (déjà coécrit avec David Foenkinos). On retrouve aussi dans ce film une thématique qui lui est chère, celle de la famille, principalement autour des relations entre frères et soeurs, mais aussi dans le couple. Et tout n'est pas rose : les relations dans la famille ne sont pas toujours faciles.

Très beau trio d'acteurs : Ludivine Sagnier est lumineuse, José Garcia touchant, Jean-Paul Rouve lunaire, auxquels vient s'adjoindre un Ramzy Bedia dans un registre qu'on ne lui connaît pas vraiment.

Lola et ses frères est vraiment un joli film, sensible et drôle, qui fait du bien. Une comédie avec plein de tendresse dedans !

Les veuves : un film de gangster féministe parfaitement maîtrisé

A Chicago, un braquage tourne mal et les quatre malfaiteurs décèdent. Ils laissent une lourde dette à leurs épouses, ce qui les met en danger. Trois d'entre elles, qui ne se sont jamais rencontrées, vont s'unir pour faire elle-même le prochain casse qui était prévu par leurs maris, le chef du groupe ayant laissé son carnet avec tous les détails de l'opération.

Les veuves est un film à la croisée de plusieurs genres : film de gangster, thriller psychologique, film de casse... On y retrouve les bandes rivales, les hommes de main impitoyables, les politiciens véreux, magouilles et corruption en tout genre... et au milieu de tout cela, quelques femmes qui comptent bien prendre leur destin en main. C'est un film de gangsters féministe, en quelque sorte, avec des femmes qui, finalement, ne veulent rien d'autre que mener leur vie comme elles l'entendent et pas comme les hommes le voudraient...

La réalisation de Steve McQueen est d'une maîtrise formelle remarquable, avec des mouvements de caméras innovants. Par exemple le long plan séquence en voiture, avec la caméra qui reste à l'extérieur, sur le capot du véhicule, alors que deux personnages dialoguent sans qu'on puisse les distinguer à travers la vitre. Brillant. Il y a aussi beaucoup de gros plans sur les visages, notamment lorsque le film se fait intimiste, et quelques scènes d'actions haletantes (dès l'ouverture du film).

Le casting féminin est impeccable, à commencer par une formidable Viola Davis dans le rôle de Veronica, qui s'improvise chef de bande, mais aussi Michelle Rodriguez et Elizabeth Debicki, ses comparses.

lundi 26 novembre 2018

Amanda : sensible, très juste, sobre et émouvant !

Paris, de nos jours. David a 24 ans. Il est très proche de sa grande soeur Sandrine, qui élève seule Amanda, sa fille de 7 ans. Mais sa vie tranquille vole en éclat lorsque sa soeur meurt de façon soudaine, dans un attentat. Désemparé, il se retrouve alors en charge de sa nièce.

Quel joli film ! Une telle histoire pourrait donner naissance à un film lourd et larmoyant... il n'en est rien. La réalisation sobre et toute en finesse de Mikhaël Hers produit un film sensible, très juste, émouvant bien-sûr mais sans jamais tomber dans le pathos. L'histoire avance paisiblement, prenant juste le temps qu'il faut. Seule la scène de l'attentat n'est pas trop convaincante... mais le coeur du film est ailleurs : dans l'évolution des relations entre les personnages, dans le chemin de deuil et de résilience, dans la découverte d'une paternité de substitution, dans la force de l'amitié et l'amour.

Vincent Lacoste n'est pas étranger à la réussite du film. Son interprétation est en tout point remarquable, dans un registre qu'on ne lui connaissait pas encore. La jeune Isaure Multrier joue juste et est touchante (elle est même extraordinaire dans la bouleversante scène finale !).

Il se dégage une douceur, une tendresse, une humanité de ce drame dont on ressort, finalement, plein d'espoir. Vraiment un très bon film !

Mauvaises herbes : une fable sociale généreuse... mais un peu maladroite et simpliste

Waël est un ancien enfant des ruees au Liban. Il vit maintenant en banlieue parisienne de petites arnaques, avec l'aide de Monique, une femme à la retraite qui s'est occupé de lui. Mais un jour Victor, un ami de Monique qu'elle rencontre par hasard (à l'occasion d'une arnaque manquée...), lui offre un petit job bénévole (il faut dire que Monique alourdement insisté). Alors qu'il n'a aucune formation, il va remplacer un éducateur auprès de six ados en difficulté et déscolarisés.

Mauvaises herbes est une fable sociale, généreuse et sincère. On retrouve ici ces caractéristiques qu'on avait appréciées dans le premier film de Kheiron : Nous trois ou rien. Bien-sûr, ça peut paraître parfois un peu naïf... mais l'optimisme et la bienveillance du film font du bien.

Ceci dit, à l'histoire centrale entre Waël et les ados, viennent d'ajouter d'autres fils narratifs, sur l'enfance de Waël, sur l'histoire entre Monique et Victor et sur quelques ados. C'est trop, à mon avis. Et là, le film fait aussi preuve de quelques maladresses, le propos est parfois un peu simpliste. On est assez loin de l'équilibre et du ton original du premier film du réalisateur. Mais dans l'ensemble, ça reste plutôt un joli film.

vendredi 23 novembre 2018

La ballade de Buster Scruggs : Bel hommage au Western... et une pépite !

Le film est une anthologie de six histoires courtes, toutes avec des personnages différents, qui constitue un hommage au Western, avec ses hors-la-loi, ses duels, la ruée vers l'or, les combats avec les Indiens, les parties de poker dans un saloon, les nuits dehors au coin du feu, les grands paysages...

Ca commence comme une farce, en chanson, avec un première histoire où l'humour noir des frères Coen fait merveille. Et puis s'installe un ton plus nostalgique, souvent cruel, où plane toujours la menace de la mort, avant de retrouver l'humour, dans les dialogues, avec la dernière histoire. Les six parties ne se valent pas forcément... mais incontestablement la cinquième, la plus longue, est un vrai bijou !

The gal who got rattled évoque le voyage vers l'Oregon d'une caravane de colons. Tout ici est une merveille : le scénario, le rythme paisible de la caravane à travers les grands espaces, la photographie, les personnages pleins de retenue, de dignité, les acteurs (remarquable Zoé Kazan !), la poésie qui se dégage de l'ensemble, le dénouement... Ces 40 minutes donnent à elles seules donnent toute sa valeur au film ! Un seul regret : ne pas l'avoir vu sur grand écran (le film n'est sorti que sur Netflix...).

lundi 19 novembre 2018

Les chatouilles : un grand film, à l'énergie folle, sur un sujet grave

Odette se décide enfin, adulte, à aller consulter une psy. C'est la première personne à qui elle ose dire qu'elle a été, pendant plusieurs années, abusée sexuellement par Gilbert, un ami proche de ses parents...

Avec ce film, Andréa Bescond adapte au cinéma, avec son compagnon Eric Métayer, le spectacle inspiré de son expérience, et qui lui avait valu le Molière du meilleur spectacle seul en scène. Les chatouilles est un drame bouleversant, sur un sujet extrêmement lourd, celui de la lutte pour la survie d'une victime de la pédophilie. Et pourtant, il y a dans ce film une énergie folle, douloureuse, violente, terrassante... et finalement salutaire. Il y a aussi de l'humour, de la poésie. Et de la danse.

La réalisation, inventive, passe habilement du présent au passé, parfois chorégraphiés, entremêlant les récits avec une certaine virtuosité. Odette, le personnage central du film, évoque ce qu'elle a vécu, ou ressenti... ou ce qu'elle aurait tellement voulu vivre. Et on le vit avec elle, avec ses yeux. On partage sa colère, sa culpabilité, sa honte, son déni. On la suit dans sa fuite en avant autodestructrice (drogue, sexe, fête...). On la voit s'épanouir, s'abandonner ou extérioriser sa douleur à travers la danse, sa planche de salut.

Et puis on est terrorisé, avec elle, lorsqu'elle est seule avec Gilbert dans sa chambre ou qu'il l'emmène dans la salle de bain pour "faire des chatouilles". On a envie de crier pour elle quand elles essaye de faire comprendre à ses proches qu'elle est en détresse mais que personne ne le l'entend, personne ne le perçoit. Comment imaginer qu'un père de famille si attentionné soit un pédophile ? On a envie de l'aider à parler, à ouvrir son coeur en présence de la psy qui essaye de l'aider (après un premier réflexe de recul, lors du premier entretien). Le relation qui se tisse entre ces deux femmes est très belle. On pleure avec elle, face à de telles souffrances terribles, face au silence, à l'incompréhension... Le film remue énormément.

Les acteurs sont tous extraordinaires. Andréa Bescond puise évidemment dans son expérience personnelle, mais quelle énergie incroyable ! Clovis Cornillac et Karin Viard, dans le rôle des parents d'Odette sont d'une grande justesse (la scène où Odette leur dit enfin ce qu'elle a subi enfant : quelle force, quelle intensité et quelle violence !). Pierre Deladonchamps est impressionnant dans le rôle cet homme si doux, attentionné... et pédophile. Glaçant.

Les chatouilles est pour moi un grand film, sur un sujet grave, traité avec originalité et force. Un film salutaire. C'est un drame terrible, dont on ne sort pas indemne. Mais c'est un drame qui laisse aussi l'espoir d'une reconstruction possible, qui illustre la puissance de la résilience, et le besoin vital des autres pour pouvoir s'en sortir, grâce à leur écoute, leur amitié, leur amour.


Les crimes de Grindelwald : un blockbuster épique, sombre et spectaculaire

1927. Le monde magique est divisé. D'un côté Grindelwald, qui s'est évadé de prison, séduit de plus en plus de partisans en promettant la domination des sorciers sur les moldus. De l'autre le ministère de la magie qui tente de contrecarrer Grindelwald, en usant parfois de violence. De son côté, Albus Dumbledore, autrefois ami très proche de Grindelwald, confie alors à son ancien élève Norbert Dragonneau la tâche d'affronter le sorcier. Pour cela, il doit se rendre à Paris, pour une aventure où il retrouvera Queenie, Jacob et sa chère Tina.

Le deuxième volet des Animaux fantastiques, la saga préquelle d'Harry Potter, est un blockbuster épique, sombre et spectaculaire.

Le film est épique grâce à de nombreux morceaux de bravoure qui en mettent plein la vue (l'évasion de Grindelwald qui ouvre le film, l'affrontement final, quelque part dans le cimetière du Père Lachaise...). C'est rythmé, réjouissant (le bestiaire !), très divertissant.

Mais l'histoire est aussi sombre. Située dans l'entre deux guerres, les échos à l'histoire sont évidents : le personnage de Grindelwald, inquiétant et remarquablement incarné par Johnny Depp, avec son discours séducteur, identitaire, évoquant la pureté de la race des sorciers face aux non-mages...

Il y a aussi dans ce deuxième épisode plus de lien avec la saga Harry Potter. Je ne suis pas un spécialiste pour dire si tout est cohérent... mais pour moi ça colle plutôt bien. Et je ne vois pas J.K. Rowling se contredire ! En tout cas, il y a des surprises et des révélations (pour autant que ce soit la vérité...) qui nous font attendre avec curiosité la suite de l'histoire !

Bref, le film est incontestablement une réussite, plus encore que le premier épisode, un blockbuster de qualité, très divertissant. Avec, notons-le, une nouvelle belle partition musicale de James Newton Howard.

lundi 12 novembre 2018

Un amour impossible : Un drame poignant, traité avec pudeur

Fin des années 50, à Châteauroux. Rachel est une modeste employée de bureau. Elle rencontre Philippe, un jeune homme brillant, cultivé, issu d'une famille bourgeoise. De leur liaison va naître une fille, Chantal. Philippe avait averti qu'il refuserait de se marier mais il refuse aussi de reconnaître sa fille. Rachel devra élever sa fille seule et elle va se battre pour que Philippe lui donne son nom... sans savoir que cela allait briser sa vie et celle de sa fille.

Un amour impossible, adaptation du roman autobiographique de Christine Angot, est un drame poignant. C'est un magnifique portrait de femme, d'une mère courage qui se bat pour sa fille, brisée par un amour toxique, en lutte dans un société des années 50-60 où la place des femmes n'était pas évidente. Une femme qui, toujours, se relève ! Elle est incarnée, magnifiquement, par Virginie Efira, dont l'interprétation est d'une justesse rare. Vraiment remarquable. C'est aussi l'évocation sensible d'une relation mère-fille, complexe et pourtant vitale : la scène finale du film est bouleversante ! C'est enfin la description d'un homme manipulateur, glaçant (excellent Niels Schneider), que nous appelons aujourd'hui un pervers-narcissique, et des dégâts terribles qu'il peut causer.

De ce drame familial, très lourd, Catherine Corsini parvient à proposer un récit fluide, évident, plein de pudeur, qui évite toute surcharge émotionnelle mais qui touche au coeur. Et il s'en dégage même, malgré tout, un espoir, celui de la résilience, où l'amour peut finalement permettre au chagrin de s'éteindre... Un très beau film.

Sale temps à l'hôtel El Royale : N'est pas Tarantino qui veut...

L'hôtel El Royale est traversé par la frontière entre la Californie et le Nevada. Ses clients peuvent choisir de louer un chambre dans l'un ou l'autre des deux Etats. Autrefois, les stars et les personnalités politiques s'y pressaient mais cet âge d'or est révolu. A la fin des années 60, quelques personnages hétéroclites (un prêtre, un représentant en aspirateurs, une chanteuse, une hippie...) vont y passer une nuit pour le moins mouvementée.

Clairement, le film se veut un portrait acide de l'Amérique. Et tout y passe : la religion, la politique, le fric, le voyeurisme, la guerre du Vietnam, les armes feu... et la violence. Mais bon, ça va parce que tout se termine en musique...

Le réalisateur, Drew Goddard, a visiblement voulu faire du Tarantino (huis-clos, flashbacks, longs dialogues, musique, déchaînements de violence...). Mais la mise en scène est démonstrative, le message surligné... et le tout est long (presque 2h30 !) et bavard. Bref, n'est pas Tarantino qui veut ! Dommage : l'affiche (quel casting !) était pourtant alléchant...

lundi 5 novembre 2018

En liberté ! : une comédie burlesque et tendre

Yvonne est inspectrice de police, veuve depuis peu. Son mari, flic lui aussi, est un héros local tombé en service. Mais elle découvre que son mari était en réalité un ripou. Perturbée, elle décide d'essayer de réparer les torts commis en veillant sur Antoine, un homme innocent que son mari avait faite condamner pour un braquage monté de toutes pièces. Mais Antoine a bien changé après 8 ans en prison... et leur rencontre va dynamiter leur vie et celle de leurs proches !

En liberté est une jolie comédie, au ton original, qui arrive à être à la fois burlesque et tendre. De façon bien rythmée s'enchaînent gags à répétition, situations absurdes, quiproquos, véritables scènes cartoonesques, humour potache et dialogues bien écrits. On ne rit pas toujours aux éclats, mais on garde la banane presque tout au long du film. Presque, parce qu'il y a aussi quelques jolis moments d'émotion dans un film qui, finalement, parle aussi avec justesse des faux-semblants.

Le film est très bien interprété par l'excellent duo formé par Pio Marmai et Adèle Haenel, mais aussi par Damien Bonnard, remarquable, que je ne connaissais pas et qui est une vraie découverte pour moi.

Bohemian Rhapsody : biopic un peu trop sage malgré 20 dernières minutes grisantes

Le film retrace la trajectoire du groupe Queen et surtout de son chanteur emblématique Freddie Mercury. On y découvre les origines du groupe, son ascension fulgurante, les excès de leur chanteur, l'implosion du groupe et le retour triomphal sur scène, lors du concert Live Aid en 1985.

Bohemian Rhapsody est un biopic autorisé, donc un peu trop sage... Le film n'est pas désagréable à regarder, il reste plutôt efficace, mais j'ai trouvé qu'il manquait de personnalité, d'aspérité. Plusieurs thématiques ne sont qu'effleurées : le rapport de Freddie Mercury (de son vrai nom Farrokh Bulsara) à ses origines et à son éducation, ses luttes avec son identité sexuelle, le SIDA... J'ai trouvé aussi que le film était assez faible sur l'évocation du processus de création, sur le travail d'enregistrement en studio (pour cela, voyez l'excellent Love and Mercy, sur le leader des Beach Boys). Mais heureusement qu'il y a la musique de Queen !

Du reste, les 20 dernière minutes du film, autour du méga concert Live Aid, sont franchement grisantes. C'est clairement le meilleur moment du film, avec des images du concert, sur scène, au plus près des musiciens, ou dans la foule à Wembley, ou avec les gens devant leur poste de télévision... Et Rami Malek y est crédible en Freddie Mercury ! Dans l'ensemble, d'ailleurs, il réalise une très belle performance d'acteur.