lundi 22 avril 2024

Civil War : un film de guerre impressionnant, et une dystopie réaliste

★★★★

Un film de guerre, mais montré du point de vue d’un groupe de journalistes. C’est très impressionnant, filmé de façon immersive et époustouflante. Le film prend parfois des atours de film d’horreur, et joue avec nos nerfs en maintenant une tension suffocante. Mais là où le film est dérangeant, et par la même occasion touche juste, c’est dans ses ambiguïtés et ses zones d’ombre.

(Critique complète ci-dessous ou ici)

Dans un futur proche, une guerre civile a éclaté aux Etats-Unis. Les états du Texas et de la Californie se sont unis contre le gouvernement fédéral. Alors que les forces insurgées progressent vers la capitale, Lee et John, deux photo-journalistes de guerre expérimentés, tentent de rejoindre Washington pour décrocher une dernière interview du président avant sa chute probable. Ils embarquent avec eux Sammy, le mentor de Lee, et Jessie, une jeune femme qui rêve de devenir elle-même photo-journaliste. 

Le film commence avec un gros plan sur le président des Etats-Unis en train de répéter son allocution, cherchant le bon ton et les bonnes formules pour faire croire à une victoire imminente contre les forces sécessionnistes. La réalité que l’on va découvrir est toute autre, évidemment… Mais on ne nous donne aucun élément de contexte, aucune explication sur ce qui a provoqué la guerre civile, sur la situation du pays, sur les enjeux précis du moment. Il faut qu’on glane les informations petit à petit, et cela nous laisse entendre par exemple que le président a établi un régime autoritaire sur le pays. 

En revanche, très rapidement on est confronté à une réalité massive : le pays est en guerre. Et c’est même le chaos. L’Amérique est à feu et à sang, la folie meurtrière se rencontre à tous les coins de rue ou de campagne, même si certains veulent faire croire qu’ils se tiennent à distance et prétendent vivre comme si de rien n’était. 

Civil War est donc d’abord un film de guerre, mais montré du point de vue d’un groupe de journalistes. Et côté film de guerre, on est servi ! C’est très impressionnant, filmé de façon immersive et époustouflante (l’assaut final est assez fou). Le film prend parfois même des atours de film d’horreur, et joue avec nos nerfs en maintenant une tension suffocante. 

Mais là où le film est dérangeant, et par la même occasion touche juste, c’est dans ses ambiguïtés et ses zones d’ombre. Quelle est la morale de l’histoire ? Eh bien, elle n’est pas si évidente que cela à dégager. Et c’est ce qui rend le film particulièrement intéressant. Comme on n’a pas tous les éléments en main, difficile de prendre parti pour les uns ou pour les autres. Même les quatre héros journalistes interrogent. Bien sûr, ils veulent être au plus près de l’action pour informer, par leurs photographies. Mais ils sont aussi en recherche d’adrénaline, d’émotions fortes, ils sont en quête du cliché ultime ou de l’interview exclusive avant les autres. 

Le film dénonce donc, évidemment, la folie de la guerre. Oui, la guerre est une folie et la guerre rend fou. Et elle donne l’occasion à n’importe qui de laisser libre cours à sa bestialité et de commettre les pires horreurs impunément. Mais le film interroge aussi la question de l’information. Quelle est la juste distance à avoir ? Comment peut-on s’assurer de l’objectivité de l’information ? Où commence le voyeurisme, la fascination malsaine ? Le dénouement du récit, et en particulier son image ultime, est quand même révélateur et assez terrifiant… Le film est aussi enfin un récit dystopique réaliste, qui ne fait que grossir le trait des fractures et des tensions de l'Amérique d'aujourd'hui, et plus largement aussi dans notre monde. Car il faut le dire, avec ce qui se passe aujourd'hui dans le monde, le film prend une dimension singulière, terriblement familière. Et là, ça fait peur ! 

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Civil War, un film d'Alex Garland
avec Kirsten Dunst, Wagner Moura, Cailee Spaeny

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