Un film beau et fort, important quant à son message. Un conte est une façon indirecte d’évoquer la réalité, et en l’occurrence celle de l’horreur absolue de la Shoah. Mais ce conte ici n’en est finalement pas vraiment un…
(critique complète ci-dessous ou ici)
Il était une fois, dans un grand bois, un pauvre bûcheron et une pauvre bûcheronne. Un jour, pauvre bûcheronne recueille un bébé, ayant été jeté d’un des trains qui sans cesse traversent le bois. Mais son mari se fâche : c’est un sans-coeur, de la race de ceux qui ont tué Dieu, il faut s’en débarrasser ! Mais pauvre bûcheronne est bien décidée à garder ce bébé et l’aimer.
La plus précieuse des marchandises est l’adaptation en dessins animés du conte éponyme de Jean-Claude Grumberg. Un film beau et fort, important quant à son message. Un conte est une façon indirecte d’évoquer la réalité, et en l’occurrence celle de l’horreur absolue de la Shoah. Le récit commence par “Il était une fois”, les différents personnages n’ont pas de nom propre, il y est question des “sans-cœur” qu’il faut exterminer, et les trains qui traversent la forêt sont mystérieux (même si on comprend aisément la réalité qu’ils désignent).
Pourtant, petit à petit, le conte s’estompe pour évoquer de façon plus frontale la réalité. On se retrouve à l’intérieur des trains, on pénètre dans le camp de concentration et on voit les corps décharnés et les cadavres, cette partie du film culminant dans une véritable vision cauchemardesque. C’est évidemment très intense… mais je me demande si l’option d’une plus grande suggestion n’aurait pas été meilleure, tout en préservant la force du récit.
En tout cas, l’option de Michel Hazanavicius permet de souligner que ce conte n’en est finalement pas vraiment un… Le bouleversant épilogue du récit joue d’ailleurs là-dessus : “On dit que rien de tout cela n’est vrai…”, rappelant au passage l’importance d’entretenir la mémoire, surtout face aux résurgences de l’impensable. Quant à la leçon, elle est sur la force de l’amour, qui peut jaillir même au cœur de l’obscurité la plus profonde. Une obscurité et une horreur absolue devant laquelle on s'interroge aussi quant au silence (réel ou perçu comme tel) de Dieu...
Les dessins, très beaux, sont de Michel Hazanavicius lui-même. De grands comédiens prêtent leur voix au personnages, avec en particulier la voix toujours extraordinaire de Jean-Louis Trintignant, dont c’est l’ultime rôle au cinéma, avant sa disparition. A noter également l’excellente bande originale composée par Alexandre Desplats.
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