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Plus qu’une mini-série, Small Axe est une anthologie de cinq films d’une durée variable (le plus court fait à peine plus d’une heure, le plus long, plus de deux heures), tous réalisés par Steve McQueen (12 Years a Slave) et qui ont en commun d’évoquer les conditions de vie des britanniques Noirs entre la fin des années 60 et le début des années 80. Cinq films qu’on peut regarder indépendamment les uns des autres mais qui proposent ensemble une fresque passionnante, engagée et tout simplement indispensable.
Mangrove
Le premier est un véritable film coup de poing, autour du procès des Mangrove Nine, un groupe de militants noirs britanniques jugés pour avoir prétendument incité à une émeute lors d'une manifestation de 1970 qui protestait contre le ciblage abusif par la police de The Mangrove, un restaurant caribéen à Notting Hill, à l'ouest de Londres.C’est un film magistral qui décrit, dans sa première moitié, les humiliations, le harcèlement et les violences racistes subies par les Noirs à Londres à la fin des années 60 et au début des années 70. Et dans sa deuxième moitié, il évoque le procès des Mangrove Nine, un événement marquant dans l’histoire de la lutte pour les droits civiques des Noirs au Royaume-Uni.
Film politique puissant et engagé, Mangrove est magistralement mis en scène par Steve McQueen qui trouve un rythme et un équilibre parfait pour décrire la colère qui monte, la tension qui devient insoutenable. Avec quelques scènes d’une intensité rare, notamment dans la deuxième moitié du film (pendant le procès, dans ses coulisses, le moment du verdict final…), portés par d’excellents acteurs, en particulier Letitia Wright et Shaun Parkes (dont un face-à-face dans les coulisses du procès est un des grands moments du film). Indispensable.
Lovers Rock
Dans les années 80, alors que les jeunes Noirs ne sont pas les bienvenus dans les boîtes de nuit, une jeune fille fête son anniversaire et organise une grande fête, dans une maison, où se retrouvent plein de jeunes, bien décidés à s’amuser et trouver l’amour.Lovers Rock est un véritable trip musical, sensuel et animal, parfois assez radical d’un point de vue formel. C’est visuellement fascinant. Dédicacé, dans le générique de fin, à tous les amoureux et les rockeurs, le film laisse planer une fausse insouciance sur ces jeunes qui passent cette soirée d’anniversaire. Car le danger et la violence ne sont pas loin : en dehors de la maison (avec une bande de jeunes blancs, une voiture de police), mais aussi au fond du jardin, à l’écart de tout le monde… Et puis quelques questions restent en suspens : qu’est-il arrivé à Patty quand elle a quitté la soirée ? Enfin, il y a le retour à la vie normale, dans les toutes dernières minutes du film, loin, justement, de l'insouciance de la fête... Brillant.
Red White Blue
Leroy, un brillant jeune homme d’origine afro-caribéenne, est médecin légiste. Mais un jour, alors que la police londonienne cherche à recruter des agents issus de la communauté noire, il décide de postuler. Et il espère bien faire évoluer le système de l’intérieur... Sa démarche est très mal prise par son père, qui la comprend comme une trahison, d’autant qu’il vient, lui-même, d’être récemment arrêté de façon abusive et roué de coups par des policiers racistes. Leroy va alors devoir faire face au racisme de ses collègues et aux réactions hostiles des siens.Inspiré d’une histoire vraie, Red White Blue est une chronique sociale désabusée, toute en colère rentrée. Un sentiment qui ressort avec force dans la formidable dernière scène du film et le dialogue entre Leroy et son père. Avec l’excellent John Boyega, le film n’est pas le plus spectaculaire de l’anthologie mais sa sobriété est incontestablement sa force. Poignant.
Alex Wheatle
Un peu dans la même veine que le précédent, le film évoque le destin de l’écrivain noir britannique Alex Wheatle. Le film s’ouvre sur son arrivée en prison, suite aux émeutes de Brixton en 1981, où il évoquera son histoire à son compagnon de cellule. Abandonné à la naissance par sa mère, Alex passe son enfance dans une institution où il est traité durement, sans amour, entouré exclusivement de blancs. Jeune adulte, il débarque à Brixton où il découvre la vie, le langage et la culture des Afro-caribéens, auxquels il appartient sans vraiment le savoir…Sans doute le moins percutant des cinq films, ce qui ne l’empêche pas d’être intéressant, Alex Wheatle parle de l’importance de connaître ses racines, qu’elles soient culturelles ou familiales, pour construire son destin.
Education
Kingsley a 11 ans. C’est un enfant assez brillant, plutôt bon en maths et qui rêve de devenir astronaute. Mais il ne sait pas lire… Alors qu’il subit des humiliations en classe, et que ses parents sont trop débordés par leur travail pour s’occuper de lui, le directeur de son école décide de l’envoyer dans une école “spécialisée”. Mais il s’avère que les enseignants de cette “école” laissent les élèves voués à eux-mêmes, sans leur apporter le moindre enseignement. Un jour, la responsable d’une association contacte la mère de Kingsley pour lui dire la vérité sur l’école où se trouve son fils.Education est le plus court des cinq films de la série mais aussi le plus bouleversant et le plus intime. C’est sans doute le plus personnel des cinq films puisque le réalisateur s’est inspiré de son propre parcours scolaire, lui-même ayant été placé dans une école de ce type à cause de ses difficultés en lecture. Le film oscille entre le point de vue de Kingsley, son désarroi, sa frustration, son incompréhension de ce qui lui arrive, et le point de vue de sa mère, qui va petit à petit prendre conscience du piège dans lequel son fils est tombé.
Et pourtant, le film se termine dans la lumière et l’espoir, avec ces très belles scènes dans la maison de cette femme qui accueille des enfants pour une “école du samedi”, et la magnifique conclusion du film, qui se prolonge pendant le générique, dans les étoiles. Tout simplement bouleversant.
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Small Axe, cinq films réalisés par Steve McQueen, disponibles sur Salto
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